23.8.12

= curupira (en français) =



Ce que je vais vous raconter, j’avoue ne l’avoir jamais vu, de mes yeux vu. Mais c’est la vérité vraie. Je vais vous raconter l’histoire telle quelle. Telle que, tout petit, j’ai entendu de mon père, qui lui a entendu de la bouche de ma grand-mère, qui l’a appris de mon arrière grand-père, qui lui a appris mon arrière-arrière-arrière grand-père. C’est donc la vérité vraie.
Mes amis, écoutez bien :
Là bas, dans l’immense forêt Amazonienne, parmi les arbres géants, en plein milieu de la forêt, loin, très loin de toutes les villes… c’est là qu’habite le plus fidèle gardien de la sublime et puissante Mère-Nature : Curupira.
Curupira est le gardien des forêts. Il est le protecteur et le défenseur des peuples de la forêt, et de tous les animaux qu’y habitent.
Il a des yeux de braise, une chevelure de feu. La peau très mate et n’est pas plus haut qu’un curuminzinho. Et la chose la plus incroyable : ses deux pieds sont tournés vers l’arrière ! Oui ! Il marche en avant, mais ses pieds sont tournés vers l’arrière ! Vérité vraie ! Vue et vécue par tous les peuples de la forêt ! C’est ainsi qu’il laisse des empreintes qui trompent les chasseurs méchants. Ils suivent les empreintes, mais c’est le Curupira qui les traque sans relâche, qui les persécute et les rend fous avec son terrible sifflement. Un sifflement fort et aigu. Plus fort et plus aigu que le sifflement d’un sifflet d’argent. Le sifflement le plus strident jamais entendu depuis que la Terre est Monde.
Le Chasseur qui rencontre Curupira, n’a pas le choix : ou il fuit la forêt aussi vite qu’une flèche, ou il reste là, paniqué, en plein milieu de la immense forêt Amazonienne, perdu pour toujours, parmi les arbres géants. Loin, très très loin de toutes les villes…
Écoutez bien mes amis :
Armé de fusil et de balles, beaucoup d’hommes lâches se croient aussi puissant que le léopard, et ils plongent dans la forêt sans se poser de question, qu’il fasse jour ou nuit. Or, tout le monde sait qu’il ne faut pas pénétrer dans le grand royaume la nuit tombée. Avec une arme à feu, l’homme se croit le roi de la jungle : il se croit plus fort que l’alligator, plus rapide que la cougard, plus cruel que l’anaconda. Sans pitié, il vise les animaux de toutes tailles : les grands, les moyens, et même les petits. À chaque empreinte, humm, l’eau lui vient à la bouche. Tel un cor de chasse, les bruits et les odeurs lui annoncent la chair tendre de sa proie. Dans cette frénésie, le doigt collé à la gâchette, il peut tuer tout ce qui respire : les mâles, les femelles, et même leurs petits, par simple plaisir de tuer. Et le chasseur qui tue pour le plaisir de tuer… ah la la, celui-là n’échappera pas à la colère de Curupira,  grand protecteur de la forêt.           
Mais attention, tous ceux qui ont tenté de chasser dans le royaume de Mère-Nature sans demander la permission, ne sont jamais revenus pour nous en parler… ils ne croyaient  pas en l’existence du Curupira !
Vous voulez des preuves ? Alors écoutez ça :
« La nuit tombait aux abords de la grande forêt d’Amazonie. Tião, chasseur habile mais un peu distrait, se prépara à entrer dans la forêt pour débusquer une paca ou un tatou pour le dîner. Mme Dina, sa femme, lui demanda de ne pas attraper de cotia. Elle n’aimait pas tellement. Sachant son mari tête en l’air, elle disait : « Rappelle-toi : Paca, oui ! Tatou, oui ! Cotia non!»
« Pour ne pas oublier, chemin faisant il répétait, comme une litanie : « Paca, oui ! Tatou oui ! Cotia non! », « Paca, oui ! Tatou oui ! Cotia non! »
« Fusil chargé et lanterne à la main, Tião prit le chemin du Noçoquém, verger sauvage dans la forêt. C’était un bon endroit pour chasser. Parce que c’est là que les bêtes affamées cherchent de la nourriture. « Paca, oui ! Tatou oui ! Cotia non! »
« Dès son arrivée, il considéra les alentours, reconnut le terrain, et prît ses repères pour le chemin du retour. Voilà, juste là, entre les deux troncs d’arbres aux bases bien plus larges que la taille de Mme Dina, si larges que même deux hommes se donnant la main n’arriveraient pas à en faire le tour. A l’affût, sur un rocher, il sortit son tabac, roula une cigarette, l’alluma, et commença à la savourer tranquillement. De là où il était, ni trop près, ni trop loin, il pouvait voir tout ce qui se passait sous les arbres. »
« Prenant de looongues bouffées, il se sentait bien, il rêvassait. Il attendait, serein, le passage d’une paca ou d’un tatou à la chair succulente. Il y avait des cotias aussi, humm, délicieuses grillées, mais Mme Dina, sa femme, n’aimait pas tellement. « Paca, oui ! Tatou oui ! Cotia non! »
« Chasseur expérimenté, Tião avait l’habitude d’attendre et savourait ces moments de paix. Il aimait écouter les sons de la forêt la nuit, les hululements du hibou, le crissement des insectes, le chant des grillons, le craquement des branches… le craquement des branches ?! Une cotia ! Il sort de sa rêverie, voit passer la cotia et se prépare à tirer. Puis se ravise. Non, Mme Dina n’aime pas ça. Il fallait attendre une paca, ou un tatou, ce n’était qu’une question de temps… »
« Tião savourait la fin de sa cigarette, lorsqu’il entendit des pas sur des feuilles sèches. Il jeta vite son mégot, prit la lanterne et l’attacha au canon de l’arme pour éclairer la cible et ajuster son tir. Pow ! Un tir unique ! Dans le mille ! C’était un tatou ! Fier de lui, il se précipite pour ramasser son butin. A trois mètres une paca énorme tente de s’enfuir. Pow pow ! Encore dans le mille ! Tião se voyait déjà exposant ses trophées sur la place du village, le sourire de Mme Dina fière de lui. Un cerf! Pow pow ! Pling !...Pling ?! Des trois balles tirées pour faire tomber le cerf, la dernière, étrangement, brilla comme une luciole. Or, une balle qui se transforme en luciole, comme vous le savez, c’est de la magie. Et la magie dans la forêt, c’est presque toujours l’œuvre du Curupira. »
« En Amazonie, seules les étoiles sont témoins de l’incroyable lumière qui est apparue cette nuit-là sur le verger du Noçoquém. Une clarté de soleil de midi inondait le Noçoquém, transformé en clairière. Partout ailleurs, la nuit. Tião regarda la crinière de feu et se mit à trembler comme une feuille. Il sentit la chaleur sortant des yeux de braise et devint pâle comme un linge. Il vit les pieds retournés et ses dents commencèrent à claquer, enfin…celles qui lui restaient : sept en haut et six en bas. »
« C’était qui, mes amis ? C’était Curupira ! »
« Le puissant gardien de la forêt était là, monté sur un énorme cochon sauvage. Étrangement, sa petite taille ne le rendait que plus impressionnant et effrayant. Tião savait qu’il était venu pour lui donner une leçon. Sans un mot, la petite créature pointe vers le milieu de la clairière et, comme dans un mauvais rêve, Tião se revoit : pénétrer dans la forêt…allumer sa cigarette…les ronds de fumée…l’attente sur le rocher, et tous ses gestes et pensées jusqu’à la mort des trois animaux.  En effet, il était entré dans la forêt la nuit, sans permission ! Il avait tué un tatou, largement suffisant pour permettre à Mme Dina de préparer le dîner, mais il ne s’était pas arrêté là, poussé par la vanité et l’excitation de la chasse, il avait tué en plus une paca et un cerf. En plus, il avait jeté son mégot par terre, mettant le feu au sous-bois. Ca commençait à faire beaucoup… »
« Rappelez-vous : le chasseur qui tue par simple plaisir… ah la la, celui-là souffre beaucoup dans les mains du Curupira. »
« Terrorisé, trempé d’une sueur glacée, Tião court en direction des deux troncs d’arbres…. Disparus ! Aucun des deux troncs aux bases bien plus larges que la taille de Mme Dina n’étaient là. Magie de Curupira ! Totalement paniqué, il pointe son arme sur la créature qui le regardait, impassible, un sourire malicieux aux lèvres. Se sentant impuissant, il fit appel à toute la rage dont il était capable pour vaincre sa peur et tira : Pling Pling Pling !...Pling ?! Son arme à feu était alors devenue une source de lumière, dont le canon crachait des flots de lucioles».
« Dans un acte ultime de désespoir, il tomba à genoux et joignit les mains pour demander pardon. Il pleura. Il s’excusa. Il promit de ne plus jamais recommencer… »
« Alors, le dieu de la forêt, gardien, protecteur des animaux et le plus fidèle défenseur de la sublime Mère Nature, effectua un large geste du bras droit. Dans un mouvement orchestré, les lucioles enveloppèrent le tatou, la paca, le cerf  ainsi que Tião. Grâce à son pouvoir magique, Curupira les fit disparaître et fit surgir quatre immense oiseaux au milieu des lucioles, d’énormes oiseaux, aux plumes brillantes et de toutes les couleurs."
« Un autre geste solennel et magique de Curupira et le fusil que Tião laissa tomber se ramollit. Puis il jaunit, s’étira, grandit, grossit, grandit encore, s’enroula, puis grandit encore, et s’enroula encore et encore… jusqu’à ce qu’il se rende compte qu’il était devenu un boa. Ravi de ne plus être un fusil, le boa remercia Curupira d’un clin d’œil et se glissa dans la forêt. »
 « Cette nuit-là, Mme Dina attendit en vain. Elle prépara le dîner avec ce qu’elle trouva dans le garde-manger. Elle mangea toute seule sur la véranda, gênée par le triste chant de l’Urutau, qui survolait en cercles l’habitation, comme pour annoncer une mauvaise nouvelle. Comme elle ne supportait pas de voir des animaux, sauf bien sûr dans ses casseroles, elle passe la nuit à ramasser des pierres pour le faire taire. »
« Cette nuit-là, au milieu de la grande forêt, bien au centre…là, juste là, très très loin de toutes les villes, le Curupira, le plus fidèle gardien de la sublime Mère-Nature, sentit la présence d’un intrus dans le royaume et se prépara pour une nouvelle mission. A la lumière de la lune la plus pleine que l’on ait vue dans la forêt amazonienne, depuis que la Terre est Monde. » 
par Felipe Schuery
(Traduction en français par les étudiants du Dept. de Portugais de l'Université Blaise-Pascal) 

=clássicos da literatura infantil brasileira=

Com consultoria de Tatiana Belinky.

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